Julien De Normandie - Assises du Commerce Equitable - ©Ingrébio

Alors que la loi EGAlim 2 vient d’être adoptée, la question de la “meilleure répartition de la valeur”, est l'un des enjeux cruciaux de la transition agricole et alimentaire, reconnaissait Julien Denormandie, Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, lors de l’ouverture des Assises du Commerce Équitable. “Vous avez été précurseurs...”, interpellait-il les acteurs présents, “nous allons tout faire pour que ces principes deviennent la règle”...

Le 25 novembre dernier à Paris, Commerce Equitable France organisait les Assises du Commerce Équitable, regroupant tous les professionnels intéressés et acteurs du commerce équitable, autour de la thématique de la transition agricole et alimentaire.

Malgré les bouleversements de la crise COVID-19, le commerce équitable continue de convaincre les consommateurs avec une croissance des ventes en France de 9% en grande distribution. Guénaëlle Gault, de l’Observatoire Société de Consommation le témoigne : « Un bon prix n’est plus le prix le plus bas pour les consommateurs ». La question de la vraie valeur des produits prend de plus en plus d’importance dans l’acte d’achat. Et avec un marché mondial atteignant 10 milliards d’euros, la France se situe au 4ème rang, après l’Angleterre, l’Allemagne et les Etats-Unis.

Les chiffres du Commerce Equitable ©Ingrébio

Mais le commerce équitable apporte-t-il les solutions dont nous avons besoin pour résoudre les problèmes socio-environnementaux globaux actuels ? Directrice de Commerce Equitable France, Julie Stoll l’affirme : “Nous nous sentons tous concernés, en tant qu’acteurs du commerce équitable par ces enjeux”. Une quarantaine d’experts et témoins étaient présents pour répondre à cette question, et inspirer les entreprises privées tout autant que les politiques publiques.

Le levier consommateur a également été abordé. En ne touchant aujourd’hui qu’un segment réduit de population et de catégories de produits, une grosse marge de progression est possible pour le commerce équitable. Quelles sont les stratégies à envisager pour orienter les consommateurs vers ce type de produits ? Les opérations de communication et de sensibilisation sont nécessaires pour éclairer, supprimer les idées reçues, intégrer la conscience des ‘coûts sociétaux’, mettre en avant les bénéfices…

Les acteurs souhaitent montrer qu’une autre culture de consommation est possible. Mise en place d’un ‘bonus malus’, réorientation des subventions, création d’un Fonds Avenir Equitable, contribution des distributeurs à la mise en place d’action d’éducation et de sensibilisation…Les suggestions pour la création de filières et l’amortissement du coût ne manquent pas.

 

Des enjeux, un constat : tout est lié

Le constat de toutes parts est unanime. “Nous rencontrons tous les mêmes problèmes”, constatait Assata Doumbia, productrice de cacao et gérante de la Coopérative Ivoirienne ECAM Méagui, à la fin de la journée. Les producteurs agricoles sont partout dans le monde, devenus les populations les plus précaires[1]. Ils ne vivent plus de leur travail. Les fermes ne trouvent plus de repreneurs. Et sans agriculteurs, comment la souveraineté alimentaire pourra-t-elle être assurée ?

La forêt, émettrice de carbone - IDDRI - ©Ingrébio

L’agriculture est pointée du doigt comme l’une des principales responsables des dérèglements climatiques, rappelait Lola Vallejo, directrice du programme climat de l'IDDRI[2]. Mais elle en est aussi l’une des premières victimes. Nous arrivons aussi à un point de bascule où l’on constate que la forêt (notamment dans certaines zones Amazoniennes déforestées) devient émetteur net plutôt que capteur net de carbone.

Enfin, de nouveaux travaux de diagnostic croisés montrent que les enjeux de perte de biodiversité sont également étroitement liés à ceux du climat. Mais les solutions, en particulier en matière agricole, peuvent aussi aider sur les deux terrains, si elles sont menées dans les meilleures conditions, selon Lola Vallejo. Mais le sujet est complexe, et certains leviers hautement politiques...

 

La relocalisation est-elle la solution ?

… et donc faut-il arrêter de commercer avec l’autre bout de la planète ?

Francois Collart Dutilleul

Selon François Collart Dutilleul, chercheur émérite en droit spécialiste du droit de l'alimentation et de la sécurité alimentaire, “relocaliser ne signifie pas forcément se rapprocher géographiquement, mais plutôt redonner un lieu/une origine à ce que l’on mange”. Et le commerce équitable aide à cela : il permet de pouvoir dire d’où vient un produit et surtout d’expliquer les bonnes raisons de sa provenance proche ou lointaine. Et il devrait aussi pouvoir permettre de connaître le nombre d’intermédiaires dans la chaîne d’approvisionnement.

Partant de cette vision, les divers experts ont pu montrer que le commerce mondial peut aussi être équitable, et surtout est un acte de solidarité avec les producteurs du monde entier. Le commerce équitable est même un “antidote” aux enjeux socio-environnementaux, et en particulier à l’accaparement des terres, expliquait François Collart Dutilleul. Car il permet de faire en sorte que la valeur reste sur place, et plus concrètement que les producteurs vivent sur leur territoire, fasse vivre leur famille et leur communauté.

 

De l’importance du soutien des politiques publiques

Pour se développer et se structurer davantage, le commerce équitable est accompagné par de nombreux dispositifs publics.

La lutte contre le ‘fairwashing’ en est l’un des objectifs, et concerne tous les maillons de la filière. Les producteurs doivent

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