Ce 17 mai, le ministre de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire a annoncé un plan d’aide de 200 millions d’euros pour soutenir l’agriculture biologique. Celui-ci est annoncé comme un renfort au premier plan d’urgence de 10 M€ lancé lors du Salon de l’Agriculture fin février. Enveloppe jugée dérisoire par les acteurs de la Bio et qui avait provoqué un mouvement de colère générale du secteur.

Quelles attributions pour cette enveloppe supplémentaire et quelles réactions au sein des acteurs bio ? … Résumé

 

Le détail du plan de soutien à l’agriculture bio

Le plan d’aide à l’agriculture biologique annoncé par Marc Fresneau ce 17 mai se décline en différents leviers[1] pour atteindre près de 200 M€ selon le ministre.

Tout d’abord, le montant de l’aide d’urgence est porté à 60 millions d’euros au lieu des 10 proposés en février. Cette aide conjoncturelle doit rapidement « aider à résoudre les difficultés les plus urgentes des filières agricoles en agriculture biologique ».

Les deux autres leviers visent à promouvoir la consommation des produits biologiques et à redynamiser le marché :

  • Un soutien financier à l’Agence Bio pour relancer la campagne de communication Bioréflexe
  • Un engagement de l’État à faire atteindre, d’ici la fin de l’année, les objectifs d’Egalim en restauration collective (50 % de produits sous signe de qualité et durables et 20 % minimum de produits biologiques) ce qui représenterait un « soutien par la demande d’environ 120 millions d’euros ».

A noter que le ministère entend aussi soutenir particulièrement les filières des fruits biologiques en remobilisant le programme européen de distribution de fruits dans les écoles (en priorisant les fruits biologiques).

 

Un plan d’aide insuffisant au regard de la crise actuelle pour les acteurs

Le secteur de l’agriculture biologique traverse une crise sans précédent depuis deux ans, confrontée à une baisse soudaine des ventes sur les circuits principaux (GMS et MSB) post-COVID.

Aussi, les réactions ne se sont pas fait attendre suite à l’annonce du ministre de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire. Dans son communiqué de presse du 17 mai, La Maison de la Bio[2] accueille le renfort du plan d’aide comme « un pas dans le bon sens », mais le juge encore insuffisant. Dans un autre communiqué commun, la FNAB, Forebio et le Synabio estiment les montants alloués « en-deçà des besoins chiffrés depuis un an ».

Le soutien conjoncturel de 60 M€, permettra d’atteindre un soutien de 960 € par ferme bio. Ceci est encore trop faible, sachant que les pertes en 2022 ont été chiffrées à plus de 150 millions d’euros par les filières. Le CNIEL identifie par exemple un besoin de 71 millions d’euros sur la seule filière laitière pour 2023 (après 53 millions d‘euros en 2022) et les professionnels du porc biologique environ 30 millions d’euros (en 2022 et aussi en 2023).

Pour mémo, les précédents soutiens d’urgence du gouvernement étaient de 1,2 milliards d’euros versé à la filière volaille, confrontée à une crise aiguë de grippe aviaire, ou de 270 millions d’euros attribués pour la filière porcine.

La filière Bio déplore donc le manque de mesures qui s’attaquent aux causes de la crise. Elle réitère également sa demande de retour de l’aide au maintien à travers l’augmentation de l’écorégime à 145 euros contre 110 euros.

Si la volonté de l’État de faire appliquer la loi dans la commande publique est appréciée, les acteurs n’en sont pas moins suspicieux. « Comment l’Etat va-t-il obliger les collectivités à agir, alors qu’il refuse de le faire depuis 2017 », s’interroge Philippe Camburet, président de la FNAB. « Cette mesure ne ressemble-t-elle pas plutôt à un transfert de dépenses vers les collectivités territoriales ? », se demande La Maison de la Bio. Quand d’autres constatent amèrement que cette enveloppe servira également à financer 50% de produits sous d’autres signes de qualité, tels que le décrié label HVE.

Pour le reste, les acteurs saluent l’investissement pour une nouvelle campagne de communication, souhaitant qu’il soit mobilisé rapidement pour retrouver les consommateurs, mais aussi que celui-ci s’inscrive dans la durée. D’autant que, selon un récent sondage IFOP[3], commandé par La Maison de la Bio, l’agriculture biologique répond à une demande croissante des Français. En effet, ce sondage réalisé en avril 2023 montre que près de 70 % des Français souhaitent une transition de notre modèle agricole français vers le bio, tandis que 64 % d'entre eux signalent un manque d'action du gouvernement.

« Si le Gouvernement souhaite atteindre son objectif ambitieux de développement de l'agriculture bio en France, fixé à 18 % de la SAU d'ici 2027 (contre 10,3 % actuellement), il devra intensifier sa démarche et faire de la transition vers une agriculture et une consommation biologique une véritable priorité dans l'agenda politique des prochains mois », conclut La Maison de la Bio.

 


[1] Communique de presse ‘Le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire renforce le plan de soutien au secteur de l’agriculture biologique, avec un appui additionnel de près de 200 M€’, 17/05/2023
[2] La Maison de la Bio a été créée afin de réunir les six principales organisations défendant les filières Bio (Cosmebio, Forebio, Natexbio, Synabio, Synadiet, Synadis Bio), rejoints en 2022 par Bio Équitable en France, BioPartenaire et Bio Valeurs. La Maison de la Bio représente 10 000 entreprises issues de l’agriculture, de l’alimentation, de la distribution, des cosmétiques et des compléments alimentaires.
[3] Etude Ifop pour La Maison de la Bio réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 21 au 24 avril 2023 auprès d'un échantillon de 1000 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

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