75% de l’amidon mondial provient du maïs. Le reste est extrait principalement du manioc, du blé puis de la pomme de terre. Les premiers pays producteurs sont les États-Unis et la Chine, représentant chacun un tiers de la production mondiale.
La France est le troisième producteur mondial et le premier producteur européen, suivie des Pays-Bas et de l’Allemagne. La production européenne représente environ 15% de la production mondiale et s’élève à 10 millions de tonnes[1]. Comme souvent, la part du bio dans ces chiffres est flouée et il est donc difficile d’estimer la production d’amidons bio.
En 2015, la production française était d’environ 3,35 millions de tonnes, dont la moitié à usage alimentaire. 49% de l’amidon provenait du maïs, 44% du blé, 6% de la pomme de terre et 1% du pois protéagineux[2].
En moyenne, l’amidonnerie française utilise chaque année près de 3 millions de tonnes de blé tendre et plus de 2 millions de tonnes de maïs[3]. En effet, la production d’une tonne d’amidon nécessite, en fonction de l’origine végétale, 1,9 tonnes de blé, 1,6 tonnes de maïs, 5 tonnes de pommes de terre ou 2,5 tonnes de pois protéagineux.
Le chiffre d’affaires de l’industrie française des produits amylacés est estimé par l’USIPA à plus de 2,5 milliards d’euros.
Zoom sur l’offre des fournisseurs d’amidons bio
D’après les estimations de l’Agence Bio, le marché de la bio en France a augmenté d’environ 20% entre fin 2015 et fin 2016. Les ventes de produits bio, tous circuits confondus, ont dépassé les 7 milliards d’euros fin 2016. Pour répondre à cette forte demande, l’offre bio monte en puissance et les produits transformés suivent la croissance, impliquant une demande plus forte en ingrédients bio.
Une tendance permanente à la hausse de la demande en amidons biologiques est notamment observée chez Kröner Stärke. Ce fournisseur allemand propose une vaste gamme d’amidons à base de blé natifs et prégélatinisés bio, présentant chacun des fonctionnalités particulières (amélioration du volume, haute viscosité, bonne adhésion, adapté au pH élevé…). L’innovation la plus récente, et mise en avant par son distributeur BÖCKER FRANCE au SIAL, est l’offre d’un amidon de blé bio sans gluten : SANOSTAR biologique. Cet amidon natif à haute viscosité possède une bonne tenue à la cuisson. Il permet notamment de stabiliser la texture de la mie des pains sans gluten et de la rendre plus aérée. Il existe également en version prégélatinisée pour un gonflement à froid : SANOGEL biologique.
“Pour modifier ses amidons, Kröner Stärke n’utilise que des procédés mécaniques et de l’eau, le process est garanti sans enzymes ni produits chimiques”, précise le directeur commercial, Henrik de Vries. L’entreprise souhaite communiquer de plus en plus sur la transparence de ses produits. Elle propose également des amidons natifs bio de maïs, riz et manioc.
Autre fournisseur d’amidons de blé natifs ou prégélatinisés bio, l’entreprise suisse Blattmann. La gamme comporte également des amidons de pomme de terre fonctionnels bio obtenus par transformation physique (chauffage et humidité).
L’entreprise finlandaise Finnamyl, en partenariat avec la société Aloja Starkelsen en Lettonie, est spécialisée dans la fécule de pomme de terre et ne travaille que l’amidon natif. Elle dispose de 3 références de fécule de pomme de terre bio : native, prégélatinisée ou déshydratée (5% d’humidité). Cette dernière peut être particulièrement indiquée pour les produits secs (poudres instantanées, sucre glace…).
“Avec une capacité d’absorption d’eau et une viscosité supérieures à celles des autres amidons, un goût et une odeur neutres, une couleur translucide et l’absence d’allergènes, les possibilités d’applications de la fécule de pomme de terre sont nombreuses”, précise Erkki Pöytäniemi, export manager chez Finnamyl. « Le fait que la transformation hydrothermique de l’amidon de pomme de terre ait lieu à des températures facilement atteintes lors du process industriel lui permet d’être utilisé dans des applications variées, et notamment là où d’autres amidons ne se transformeraient pas« , ajoute-t-il.
Le fournisseur autrichien Agrana Stärke, propose lui aussi plusieurs références de fécules de pomme de terre bio mais également de l’amidon natif de blé bio et surtout des amidons de maïs et de maïs cireux (waxy) bio, pour lesquels il est leader du marché.
La fécule de pomme de terre bio existe en version native, déshydratée (6% d’humidité) aux propriétés absorbantes optimales et enfin en version prégélatinisée, recommandée pour des utilisations à froid ainsi que pour l’obtention de textures lisses et transparentes.
Les amidons bio de maïs et de maïs waxy (riche en amylopectine) se déclinent quant à eux sous forme native et prégélatinisée, mais également sous une forme stabilisée par un traitement physique qui permet de réduire la tendance à la rétrogradation et qui améliore la stabilité en milieu acide (jusqu’à un pH = 3,0). Une version déshydratée (6%) est disponible uniquement pour l’amidon de maïs bio.
Depuis 2014, Agrana Stärke a également développé un amidon de maïs prégélatinisé bio dédié aux sauces et condiments allégés : QuemLite® Bio. Dans les émulsions à froid, il améliore la taille et la répartition des particules et permet une stabilité optimale. Grâce à sa forte capacité de rétention d’eau, il augmente la viscosité et il est ainsi capable de remplacer la matière grasse des sauces sans en dégrader la texture ou la sensation en bouche. Le même type d’action est possible sur les pâtes à tartiner à teneur réduite en matière grasse avec AgenaLite® Bio, un amidon de maïs waxy bio, développé plus récemment. Un de ses atouts est l’obtention de pâtes avec un bon étalement à la sortie du réfrigérateur.
Le dernier né AgenaDyn® Bio, un amidon de maïs bio produit par acidification et séchage, a été conçu pour une application dans les produits “tartinables” afin d’en améliorer l’étalement. En formant une structure gel, il remplace favorablement la gélatine dans les recettes végétariennes notamment et améliore la texture et la sensation en bouche.
L’entreprise Beneo dispose quant à elle d’amidons de riz natifs ou prégélatinisés biologiques. De plus, un nouvel ingrédient a récemment été lancé : Remypure, un amidon de riz cireux fonctionnel, non bio mais clean label, à haute stabilité. En effet, il résiste aux conditions de transformation extrêmes (forte température, pH faible ou niveau de cisaillement élevé) tout en améliorant la durée de conservation et la texture des produits. Il est donc particulièrement adapté à la formulation de soupes et sauces stérilisées, de petits pots pour bébés, de desserts lactés ou de préparations de fruits.
Autre offre d’amidons fonctionnels : la gamme Novation® d’Ingredion, à base de maïs, pomme de terre ou manioc. Différents niveaux de résistance au process sont proposés et ils sont disponibles en version bio. Ils permettent d’obtenir la texture voulue malgré des procédés industriels difficiles, tout en améliorant la stabilité dans le temps. Les grains d’amidon restent intacts et gardent donc leur fonctionnalité.
Spécialiste historique du manioc, Tipiak Industrie propose de la fécule de manioc native bio ainsi que la gamme Tapiocaline, un amidon fonctionnel disponible en bio en 5 granulométries, selon les applications et les effets souhaités. “En plus d’apporter une texture crémeuse et moelleuse grâce à son fort pouvoir de rétention d’eau, elle permet notamment de diminuer la quantité de protéines texturées de soja ou de blanc d’oeuf, qui font partie des allergènes, ou bien le taux de matière grasse à destination des produits allégés”, explique Elodie Le Pironnec, Responsable Commerciale Industrie chez Tipiak. Les applications sont variées : viandes et poissons, plats cuisinés et sauces, produits laitiers, biscuiterie et pâtisserie…
Côté financier, les prix des amidons dépendent du prix de la matière première végétale et de sa propre richesse en amidon ainsi que de la valorisation des coproduits de son procédé d’obtention. En 2015, les prix des amidons bio étaient d’environ 1,5 à 3€ / kg pour le blé ou le maïs, 5 à 6,5€ / kg pour le manioc et encore au delà pour le riz.
Problématiques d’approvisionnement
La mauvaise récolte 2016 de blé tendre français dont nous parlions dans notre dossier conjoncturel sur les céréales impacte aussi le secteur de l’amidonnerie.
Les caractéristiques inhabituelles du blé (poids spécifique hétérogène et faible, taux de protéines plus élevé et donc extraction protéique plus difficile) obligent les amidonniers à adapter leurs procédés de transformation, engendrant des coûts de production supplémentaires. La difficulté de travail du blé provoque également une baisse des rendements d’extraction de l’amidon.
Pour sécuriser les approvisionnements dans ce contexte tendu, les relations entre producteurs et fournisseurs sont primordiales. Les témoignages comme celui de l’amidonnier Kröner Stärke le prouvent. “Nous avons vraiment rencontré ces dernières années des difficultés pour s’approvisionner en blé biologique. C’est pourquoi nous avons adopté une stratégie de développement de partenariats durables dans différents pays”, explique Henrik de Vries. S’ils permettent de sécuriser les volumes minimum et d’éviter les pénuries, ces contrats n’empêchent par contre malheureusement pas de subir la hausse des prix du marché…
L’année 2016 n’a pas épargné non plus les pommes de terre. Les mauvaises conditions climatiques ont favorisé le développement du mildiou dans les plantations. Sans possibilités de traitement en bio, les rendements ont été divisés jusqu’à 3 dans certaines régions. L’export manager de Finnamyl, Erkki Pöytäniemi, indique par exemple n’avoir collecté que 50 à 70% de sa récolte habituelle. Même constat chez Agrana Stärke, où la responsable marketing Tatjana Figl-Wolfsberger précise que les volumes sont très limités cette année. Cette mauvaise récolte est généralisée sur toute l’Europe et il y a, à l’heure où nous écrivons ce dossier, une réelle pénurie sur le marché de la fécule de pomme de terre bio. Or, comme vu précédemment, la fécule de pomme de terre possède des caractéristiques particulières et n’est parfois pas facilement remplaçable par un autre amidon dans certaines applications.
Il faudra attendre la prochaine campagne en septembre-octobre 2017 pour avoir de nouveaux volumes… et perspectives…
Perception du consommateur
Une étude d’Ingredion, menée par MMR Research Worldwide en 2013 sur les comportements de consommation en Europe, montre que pour 86% des Français la liste d’ingrédients est importante lors de l’achat d’un produit (moyenne européenne : 78%).
Les consommateurs européens identifient assez bien les amidons puisqu’ils se situent en 8ème position des ingrédients les mieux reconnus, après notamment le sucre/glucose, les colorants et arômes artificiels, les conservateurs… C’est donc un terme qu’ils ont l’habitude de voir et qui leur est familier. Au niveau du type d’amidon, le maïs est le mieux reconnu (10ème place), suivi de la pomme de terre (13ème). S’ils connaissent bien le terme générique amidon, les consommateurs européens ne sont en revanche pas très coutumiers des amidons de riz et de tapioca, ni des amidons modifiés.
Au niveau de la tolérance du consommateur vis-à-vis des ingrédients d’un produit, les amidons sont bien acceptés, ils sont à la 6ème place derrière les colorants et arômes naturels, le sucre/glucose, les huiles végétales et… l’amidon de pomme de terre ! Autrement dit, les Européens acceptent facilement de consommer des produits contenant des amidons. Le maïs est le deuxième amidon le mieux toléré (7ème place), suivi du riz (10ème) alors que l’amidon de tapioca (22ème) est moins bien toléré par le consommateur que les amidons modifiés (21ème). Peu connus, ces deux derniers types d’amidons ne sont donc pas perçus de manière positive.
Nous avons vu en partie III que les amidons peuvent être associés à des hydrocolloïdes afin d’obtenir une synergie dans les produits. Ces derniers sont en revanche largement moins reconnus et acceptés par les consommateurs européens, bien que la pectine soit toujours devant les amidons modifiés et de tapioca.
Ainsi, les consommateurs n’acceptent pas les ingrédients au nom évoquant “la chimie”, long et complexe. Les termes inconnus les rebutent et ils sont plus sereins avec des ingrédients qui leur sont familiers, comme le sucre, le sel, les levures… et l’amidon !
Pour certains amidons, différentes appellations sont d’ailleurs indiquées sur les étiquetages des produits. Dans notre enquête, c’était notamment le cas de la fécule de manioc, retrouvée également sous les termes “amidon de manioc” ou encore “tapioca”. Les mentions “fécule” et “tapioca” seraient plus rassurantes pour le consommateur car à consonance plus “naturelle”. Il en est de même pour l’appellation “farine de graines” de guar et de caroube, plus habituelle et naturelle pour le consommateur que la mention “gomme”.
Alternatives naturelles et perspectives pour les amidons bio
Comme nous venons de le voir, l’alternative des hydrocolloïdes présente plusieurs inconvénients : il ne s’agit plus d’ingrédients mais d’additifs, pas toujours disponibles en bio (exemple : gomme xanthane) et bien moins acceptés par les consommateurs.
D’autres ingrédients alternatifs aux amidons existent alors : les farines fonctionnelles. Plusieurs des fournisseurs d’amidons bio cités précédemment en proposent (Kröner Stärke, Agrana Stärke…), sur différentes sources : blé, maïs, riz, seigle, pomme de terre (poudre)…
Ce sont par exemple des farines qui ont été extrudées afin de donner des farines prégélatinisées. Elles s’utilisent dans les produits de boulangerie et pâtisserie, pour les fourrages, les soupes et les sauces… Selon l’application, elles apportent de la viscosité au produit, de l’expansion, donnent du moelleux, permettent une meilleure tenue à la cuisson, le stabilisent… Et elles présentent l’avantage d’être juste étiquetées “farine de …”. Ces farines fonctionnelles doivent obligatoirement être bio.
En conventionnel, l’offre disponible en amidons dispose d’une plus grande diversité des origines végétales et donc des fonctionnalités. On observe notamment depuis plusieurs années le développement de l’amidon de pois, caractérisé par sa richesse particulière en amylose. Avec une température de gélatinisation basse, cet amidon est facile à utiliser et donne des gels stables et résistants. Au vu de la teneur en amidon des graines de légumineuses, celles-ci constituent sans nul doute, une perspective d’évolution intéressante pour les amidons bio.
Et du côté réglementaire, ne pourrait-on pas s’attendre à une mise à jour de l’annexe IX, notamment pour le cas des deux amidons listés : l’amidon de riz et l’amidon de maïs cireux étant dorénavant disponibles en bio sur le marché européen ?
Selon l’IFOAM Europe, cette question n’a pas encore été soulevée, à ce jour.
[1] Source : Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, 2013.
[2] Source : Union des Syndicats des Industries des Produits Amylacés et de leurs dérivés (USIPA), 2015.
[3] Source : FranceAgrimer, 2015.